La mémoire d'un village

La quiétude actuelle des vallées de la Meuse et de la Molignée fait qu’il est difficile  de s’imaginer ce même paysage en champ de bataille, et pourtant…

Longtemps les sacrifices des soldats français de 1940 sont restés inconnus, étouffés par la censure inconsciente d’une France profondément blessée par une défaite écrasante. A côté des anciens combattants de la Grande Guerre, des résistants à l’occupant et des Forces Françaises Libres, il y avait peu de place pour ceux de 40.

Haut-le-Wastia (Anhée) est certainement une exception à cette situation. Théâtre de violents combats du 13 au 14 mai 40, le village subira des dégâts importants. L’inhumation des soldats tués pendant ces combats s'étalera sur plusieurs mois. Les Allemands seront provisoirement enterrés en deux carrés. Face au carré allemand du cimetière du village, de l’autre côté du vallon, un autre lieu accueillera les victimes françaises. Chaque tombe française sera entretenue par une marraine, habitante du village.

1970 : Construction du Mémorial

Dans l’après-guerre, des Français reviennent sur les lieux où ils ont combattu. Des amitiés avec les habitants se nouent progressivement ; à tel point que dans les années 60, un comité du souvenir se crée à Haut-le-Wastia. Il est décidé d’ériger un mémorial à l’endroit où est tombé le capitaine Fockedey du 129e Régiment d'Infanterie (RI). Le monument, construit gratuitement par 7 maçons de Haut-le-Wastia, est inauguré le 12 juillet 1970 en présence de nombreuses autorités civiles et militaires, belges et françaises, de vétérans, de familles françaises et des habitants du village. A noter qu’une plaque en mémoire du lieutenant Riss, pilote français ayant posé son chasseur en catastrophe le 13 mai à Haut-le-Wastia, sera apposée en mai 2011. Invitée par les anciens du 129e RI, une délégation de Haut-le-Wastia aura même l’honneur en 2002, de raviver la flamme du soldat inconnu sous l’Arc de Triomphe à Paris.

Photo d'Henri Doublet, sergent au 129e régiment d'infanterie. Collections du Musée du Souvenir - Mai 40

"C’est au nom de mes camarades… que je me permets de vous remercier, vous, amis belges, plus français que nous, d’avoir pris soin de la première sépulture et du souvenir de ceux d’entre nous venus mourir sur votre terre en essayant de la défendre…

De nombreux habitants m’ont dit que nous étions chez nous… chez vous… comme en Mai 1940… et plus encore… C’est vrai! Car j’ai pu constater que tout combattant du 129e R.I. peut frapper à n’importe quelle porte… Elle est toujours ouverte…"

Henri Doublet, sergent motocycliste au 129e Régiment d’Infanterie, 1974

"Il ne fait aucun doute que les combats de la Meuse ont marqué les vétérans... Rappelons-nous du colonel Aublet, un ami fidèle, un homme de coeur... Souvenons-nous plus particulièrement de sa dernière visite à Haut-le-Wastia. Il aimait sincèrement notre village, ses gens, ses maisons, ses sentiers, ses bois... Pendant le vin d'honneur d'une commémoration, on s'aperçut soudain qu'il avait disparu. Un quart d'heure plus tard, il rejoignit l'assemblée aussi discrètement qu'il l'avait quittée. Il était tout simplement allé se recueillir à l'endroit même où l'un de ses hommes était tombé... 

Photo de Dominique Halloin, président de l'asbl Musée du Souvenir - Mai 40

Il ne faudra jamais oublier ce que vécurent ces hommes; gardons toujours leur souvenir bien présent en leur exprimant toute notre reconnaissance... 

Le devoir de mémoire reste seul garant contre l'oubli des sacrifices consentis."

Dominique Halloin, Président de l'A.S.B.L. Musée du Souvenir, Batailles de la Meuse, Mai 1940

2003 : Inauguration du Musée du Souvenir - Mai 40

Après quelques expositions temporaires consacrées à mai 40, vient l’idée de créer un musée permanent. Il faut cependant attendre 2002 pour que les volontés s’unissent dans l’asbl Musée du Souvenir, Batailles de la Meuse, mai 1940.

La commune mettra à disposition, après rénovation, une aile du bâtiment de l’école communale. Enfin en mai 2003, en présence de 22 vétérans, le Musée du Souvenir ouvre ses portes. L’équipe de bénévoles compte une cinquantaine de membres issus du village, de la commune et de la région mais également de bien plus loin pour certains (France!). Ils se chargent de l’entretien et de la gestion du musée et assurent les permanences et les visites guidées.En coulisses, les plus « mordus » tentent d’améliorer les collections par leurs recherches mais aussi par la mise en valeur des pièces présentées : travaux de peintures ou d’éclairage, construction de décors et de mannequins pour présenter les uniformes, vitrines, modèles réduits, prise de photos et même réalisation de montages audio-visuels… (travail soutenu par les services de la Commune d’Anhée). Les salles présentent aux visiteurs des cartes, des photos souvent uniques, de l’armement et des uniformes avec de nombreuses explications. Des scènes grandeur nature et des films expliquent le cadre des combats et les conditions de vie des soldats. Un plan en relief du champ de bataille (6 m²) permet aux visiteurs de visualiser les difficultés du terrain et de localiser les différentes actions.

Rafraîchi et enrichi chaque année, le Musée du Souvenir connaît ainsi une évolution permanente. Toujours fidèle aux souvenirs des vétérans, les membres de l’asbl ont à cœur de préserver la mémoire de ces combattants longtemps oubliés par l’histoire.

L'équipe du Musée du Souvenir - Mai 40

Les bénévoles du musée maintiennent les relations avec la France : longtemps points de contact des vétérans , c’est aujourd’hui avec les familles que les échangent se poursuivent. De surcroît, le musée se charge depuis plusieurs années des cérémonies commémoratives du mois de mai (tous les 5 ans). Le musée et certains de ses bénévoles sont devenus au fil du temps des références pour les passionnés d’histoire militaire et les chercheurs. Ils organisent aussi des tours commentés du champ de bataille.

Photo d'une assemblée générale du Musée du Souvenir - Mai 40

Nos objectifs (repris aux statuts de l'asbl)

  • Sauvegarder la mémoire des batailles de la Meuse en mai 1940
  • Assurer la pérennité du souvenir de ces événements, par la création d’un musée à Haut-le-Wastia, haut lieu de résistance de l’armée française, la présentation de documents, maquettes et témoignages et tous autres objets se rapportant à cette période de l’histoire, l’organisation de manifestations culturelles et didactiques en rapport direct avec ses buts, la sauvegarde de tout document ou de tout bien meuble ou immeuble liés à l’objet et la sensibilisation des responsables publics, des propriétaires et de la population aux objectifs de l’association par tout moyen approprié
Un travail d'équipe : mai 2023, repas de fin de démontage des installations des commémorations par l'équipe du musée, des habitants, des reconstitueurs, des familles françaises, des membres du Comité des Jeunes de Haut-le-Wastia et l'aide de l'école !

Un travail d'équipe : mai 2023, repas de fin de démontage des installations des commémorations par l'équipe du musée, des habitants, des reconstitueurs, des familles françaises, des membres du Comité des Jeunes de Haut-le-Wastia et l'aide de l'école !